14 - L'Islande a inventé l'eau tiède

14 Juillet 2019

Tôt ce matin un petit vent s'est levé. Rester un peu dans le duvet sous la tente un peu secouée... mmhh, le bonheur. Mais il faut se lever.

Le temps est « gris-très-beau », presque « bleu-moche ». Cela veut dire que l'atmosphère est lumineuse, que le soleil perce facilement les nuages poussés par le vent, que le glacier au loin est scintillant. Ça veut dire aussi pas trop de moucherons.

Après cette nuit réparatrice, au calme sous la tente tandis que nos affaires séchaient dans le refuge, le moral est au beau fixe.

Au moment du départ, nous sommes de nouveau l'objet de la curiosité du groupe de français.

Ils ne comprennent pas pourquoi on se donne tant de peine alors qu'on peut voir plus de choses plus facilement et plus vite en bus ou en 4x4...

Plus, toujours plus... Nous pourrions leur expliquer que notre bonheur n’est pas dans la quantité de choses vues ou de kilomètres parcourus, mais dans la saveur de l’instant présent, sa qualité, sa plénitude, ses multiples dimensions : animales, sonores, végétales, odorantes, minérales....

« Je ne suis pas venu ici pour connaître [le pays], mais pour être heureux », disait en substance Jean Giono dans Le Voyage en Italie.

Nous les laissons à leur 4x4.

Après un petit raidillon d'1 km pour ressortir du vallon où se trouve le refuge, nous reprenons la F35. Pendant les 15 premiers km, le vent nous pousse. Nous prenons assez de vitesse pour moins sentir la tôle ondulée.


Le kjölur est cette immense étendue désertique sur laquelle nous progressons depuis 3 jours. C'est le lit d'un ancien glacier, parsemé de gros rochers. Quelques moutons y broutent les rares touffes d'herbe qui poussent entre les cailloux. Pas de trace de vie humaine, à part la piste où nous roulons et quelques poteaux indicateurs.

Ça se gâte. La piste s'oriente à l'ouest puis au sud-ouest. Fini la rêverie ! Il faut se reconcentrer, éviter les embardées, ne pas s'ensabler en roulant trop au bord, ne pas faire craquer les dérailleurs quand la pente remonte brusquement.

Nous arrivons à Hveravellir. 27km : c'est peu mais ça suffira pour aujourd'hui. Première chose à faire : installer la tente. Nous choisissons un petit coin herbeux près d'une table et d'un ruisseau d'eau tiède.

Hveravellir est une zone géothermique, avec plein de mini-geysers et de glouglou d'eau bouillante. A nouveau nous marchons sur le couvercle d'une monstrueuse marmite, percé de partout. De la vapeur s'échappe avec un bruit de locomotive d'un cône aux couleurs soufrées. Des pontons en bois permettent de s'approcher sans se brûler les pieds, car même sur le chemin ça glougloute ! Au passage, on se prend des bouffées de vapeur humide aux odeurs d'œuf pourri.





Mais le meilleur, c'est le bain chaud !

Toute cette eau bouillante qui jaillit de partout se retrouve dans une petite piscine naturelle. D'un côté un tuyau amène l'eau bouillante, de l'autre côté un tuyau amène l'eau « froide » (tiède, en fait). Au milieu l'eau doit être à 40°. On rentre du côté froid et on règle la température en s'avançant plus ou moins vers le coté chaud. Il y a des pierres pour s'asseoir. On peut y rester des heures...Trop bon !

En sortant j'étais à la limite de tomber dans les pommes. J'ai dû régler un peu trop chaud.

Ce soir nous nous endormons avec une berceuse Islandaise : le bruit du vent qui secoue la tente, le glouglou du torrent tiède qui passe à côté, le bruit continu et imperturbable du solfatare pas très loin...

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